Les coups de téléphones incessants réveillèrent Alcide qui dormait d’un sommeil profond. Il ronchonna quelques insultes à l’encontre du téméraire qui osait le bousculer dans ses rêves, avant de décrocher d’une voix totalement éteinte. En quelques secondes, son état de léthargie se changeait en un état de nervosité intense. Il sauta du lit, enfila les premiers vêtements qu’il trouvait et se rendit en courant jusqu’à sa voiture. Ses sens étaient en alerte. Ce coup de fil s’avérait des plus excitants, bien qu’annonçant une très mauvaise nouvelle. En une dizaine de minutes, il atteignit le centre de la Division, puis la salle de contrôle qui était pleine. Un silence oppressant y planait, silence qui, une nouvelle fois, ne laissait rien présager de bon. Alcide était l’un des meilleurs agents de la Division, il en avait conscience. En balayant la salle du regard, il fut heureux de constater qu’uniquement les meilleurs éléments figuraient à cette réunion des plus importantes. Il savait qu’il était une clé de la Division, et il était ravi de le constater à nouveau. « Bien, si vous êtes ici, c'est que j'ai besoin de vous pour une mission de la plus haute importante. » Alcide ne se concentra plus sur le reste de la pièce ou des agents présents, mais bel et bien sur les paroles de Percy. Il écoutait attentivement tous le discours du grand dirigeant. Dès que ce dernier fut terminé, il quitta la pièce sans un mot. Il savait ce qu’il lui restait à faire. Alcide n’avait pas besoin de la permission de Percy, puisqu’il était probable que son rôle concernant cette recherche avait déjà été décidé. Alcide avait fait ses preuves sur le terrain depuis de nombreuses années. Il n’était donc pas question qu’il se retrouve à jouer les plantes vertes en restant à la Division. L’Angleterre l’attendait.

Alcide avait insisté sur le fait que la jeune et charmante Cataleya serait son double durant cette mission. Il l’aimait bien, cette petite. Lui pourtant si peu enclin à s’ouvrir aux autres et à lier des amitiés, il s’était attaché à la demoiselle. Selon lui, elle était une personne de confiance. La demoiselle avait toujours su mener à bien son travail, et leurs idéologies les avaient rapprochés. Malgré tout, Alcide avait remarqué un changement de comportement flagrant chez cette dernière. Sa loyauté ne semblait plus aller entièrement à la Division. Pour l’instant, il avait fermé les yeux, ne désirant pas que cette effroyable vérité soit réelle. Pas elle. Pas Cataleya, l’une des seules personnes dignes de confiance qu’il n’ait jamais rencontrée. Cependant, les semaines passaient et ses soupçons augmentaient. La jeune femme était louche. Elle cachait quelque chose, et Alcide comptait mettre la main dessus. Il n’osait pas imaginer qu’elle puisse tomber dans les mains de la Corporation. Connaissant la jeune femme, il était persuadé qu’elle souhaitait uniquement vivre une vie dite normal. Du moins, il s’en persuadait. Il ne pouvait plus attendre pour obtenir des réponses. Ainsi, elle serait son accompagnatrice. Cette fois, plus qu’une amie, elle allait être sa cible.

Le voyage en avion jusqu'à Londres s'était fait dans un silence oppressant, Alcide n'étant pas motivé à parler. Il avait réfléchi au contenu de la mission confiée par Percy, ainsi que celle qu'il s'était confiée à lui-même. Percy avait fait preuve de faiblesse. Les Gardiens sont supposés être des gens de confiance, ceux dont on pourrait confier nos plus grands secrets. Alcide, en tant qu'agent depuis une quinzaine d'années, avaient découverts les réels visages de son patron et connaissait le but des Gardiens. Mais, il n'avait rien dit. Passer maître en l'art de la manipulation, Alcide était conscient que de découvrir les secrets de Percy pourrait s'avérer utile. Ainsi, il était pris d'une irrésistible envie de tomber lui, et lui-seul sur ce fameux Gardien, avant tout le monde. En même temps, il ne voulait pas risquer sa vie avant de finir la mission sur laquelle il est depuis des mois, la manipulation de Genesis. Avant tout, il devait la faire changer de camp. Restait encore Cataleya et son changement de comportement. Alcide restait silencieux durant le voyage, mettant en place ses nombreuses stratégies. C'était l'un des désavantages d'être avide de pouvoir et de gloire.

Dès qu'ils eurent posés les pieds sur le sol anglais, Alcide gardait cette froideur vis-à-vis de sa petite protégée. Sans un mot, ils se rendirent à l'hôtel où ils logeraient durant les jours qui suivront, et où ils se mettront d'accord sur une stratégie. Après le voyage en avion, ce fut le voyage en taxi qui fut silencieux. Le jeune homme était décidé à parler qu'une fois que les deux agents se retrouveraient seuls. Il monta les marches de l'hôtel quatre à quatre, ouvrit d'un coup sec la porte pour découvrir leur nouveau logement. Il laissa à la demoiselle le temps de prendre ses marques, tandis que lui regardait le paysage à travers la fenêtre. Quelques instants plus tard, sentait que Cataleya avait dû inspecter la chambre, il ferma les rideaux avant de se retourner vers elle. « Penses-tu être capable de te concentrer sur notre boulot ? » demanda-t-il en croisant les bras, ne lâchant pas la demoiselle du regard.

Cataleya se trouvait dans les bras de Morphée lorsque la sonnerie de son téléphone avait perturbé son sommeil de plomb. Sans ouvrir les yeux pour autant, sa main s’était mis à tâtonner la table de chevet pour y attraper l’objet de malheur et un simple coup d’œil à l’écran suffit à prédire l’identité de la personne qui cherchait à la joindre ainsi que de la situation d’urgence. L’asiatique s’assit donc au bord de son lit et d’un même moment décrocha le téléphone en passant une main dans ses cheveux désordonnés pour tenter vainement de les discipliner un peu. « Oui ? ». Son interlocuteur fut très bref. Il lui ordonna simplement de se rendre à la Division au plus vite pour une mission de la plus haute importance et Cataleya s’exécuta aussitôt qu’il eut raccroché. Elle enfila une tenue et quitta son appartement au volant de sa « voiture de fonction » gracieusement offerte par la Division, à l’instar de l’appartement… et de tout ce qu’elle possédait, en fait. Arrivée sur place, la jeune femme eut la surprise de constater que tous les agents en activité avaient été rassemblés dans la salle de contrôle. Ils étaient tous captivés par la présence de Percy, attendant que celui-ci ne daigne ouvrir la bouche. « Bien, si vous êtes ici, c’est que j’ai besoin de vous pour une mission de la plus haute importance. » avait-il dit, guettant les réactions avant de poursuivre sur la présentation de la « cible » dont il était question. Les agents étaient tous suspendus aux lèvres de Percy, mais l’explication de ce dernier était très succincte. Trop succincte pour Cataleya qui commençait sérieusement à se poser des questions sur les faits reprochés. Lorsqu’il eut terminé, le groupe éclata aussitôt. On aurait presque dit une fourmilière en ébullition, mais au moment où elle allait quitter la pièce, Alcide l’interpella et insista pour qu’elle l’accompagne. Une requête qui fut bien évidemment autorisée. Cataleya non plus n’y voyait pas d’inconvénients puisqu’elle connaissait Alcide depuis son entrée à la Division ; il avait été son mentor et aujourd’hui, un ami, en quelque sorte puisque ce genre de relation n’avait pas vraiment leur place au sein de la Division. En fait, ils se devaient d’être des machines ou mieux encore, des sociopathes comme Teddy. Cataleya lui faisait confiance et elle savait qu’il en était de même pour Alcide. Tous deux avaient réalisé bon nombre de missions et toutes avaient été couronnées de succès ce qui n’était pas nécessairement le cas lorsqu’elle faisait équipe avec d’autres agents. Pourtant, son coéquipier lui semblait étrangement froid et distant aujourd’hui.

Dès qu’ils eurent quitté le fort, un silence pesant s’abattit froidement sur eux et c’était une situation à laquelle Cataleya n’était pas habituée. En règle générale, ils n’avaient aucun mal pour discuter ensemble que ce soit de l’ordre d’une mission ou non, mais ce silence… il n’augurait rien de bon ! Alcide avait réussi d’office à la mettre mal à l’aise par son comportement peu habituel et tous les muscles de son corps s’étaient tendus comme attendant une chute qui ne semblait pas venir. De temps en temps – lorsqu’Alcide regardait ailleurs – son regard glissait rapidement sur son visage pour tenter d’y lire quelque chose, malheureusement lire dans les esprits n’est pas une chose que l’on enseigne à la Division ; si elle tenait vraiment à connaître la raison d’un tel comportement, Cataleya allait devoir prendre son mal en patience. En tout cas, ce n’était sûrement pas elle qui ferait le premier pas.

[…]

Ils gagnèrent enfin l’hôtel et là encore, Alcide fit preuve d’une brutalité qui l’intimida, mais elle procéda tout de même aux vérifications d’usage afin de savoir par où s’échapper en cas d’urgence ou ne serait-ce que les différents points qui lui offraient un angle de tir dégagé et idéal, vint ensuite la reconnaissance de la chambre d’hôtel en elle-même. Cataleya posa ses affaires sur le lit et ouvrit son sac pour y prendre quelques affaires. Ils étaient partis en coup de vent, la jeune femme ressentait vraiment le besoin de prendre une douche et de grignoter quelque chose avant d’intenter quoique ce soit, mais ce fut le moment qu’Alcide choisit pour prendre (enfin) la parole. « Penses-tu être capable de te concentrer sur notre boulot ? ». Cataleya fut comme piquée au vif. Ses sourcils se froncèrent d’incompréhension et sa bouche s’entrouvrit légèrement. Elle eut un moment de flottement avant de lui répondre sur le même ton. « Alcide ; tu m’as entraîné, on a fait quelques missions ensemble et tu as insisté pour que je t’accompagne sur celle-ci. C’est un peu tard pour les questions de ce type, tu ne trouves pas ? » dit-elle, répondant à sa question par une autre tout en reposant ses affaires sur le lit pour enfin établir un contact visuel avec Alcide. Elle hésita un moment et lâcha finalement un « Qu’est-ce qui te prend aujourd’hui ? » croisant à son tour les bras sur sa poitrine pour le défier du regard.

Dès qu'Alcide avait été mis sur cette mission, le nom de Cataleya comme partenaire s'était imposé à lui. Il ne s'était pas soucié de savoir si des équipes avaient été formées et des rôles attribués. Il s'en fichait. Son truc à lui, c'était d'aller sur le terrain, et Percy le savait mieux que personne. Ainsi donc, il n'avait pas attendu qu'on lui donne des ordres. Cette disparition d'agent venait au bon moment. C'était l'occasion ou jamais qu'il se retrouve seul avec Cataleya. Il n'avait aucune intention de lui faire du mal, du moins pas physiquement, mais il appréciait le fait qu'ils n'allaient être qu'entre eux, sans curieux à proximité. Bien qu'il allait remettre en doute Cataleya, il préférait le faire loin des autres. Et si ces craintes s'avéraient fondées, il préférait être le seul au courant. Car même si elle devenait une traître à la fin de la journée, il ne souhaitait pas la mettre en danger. La Division abritait de sacrés psychopathes dans ses rangs, et dieu sait ce qu'ils pouvaient faire à quelqu'un trahissait leur rang - que ce soit pour rejoindre la Corporation, vivre une vie normale ou quoi que ce soit. Alcide ne savait pas encore quelles étaient les réels intentions de Cataleya, mais il comptait bien le découvrir aujourd'hui. Il ne pouvait plus attendre un jour de plus. Il n'avait pas été très bavard dans l'avion, il en avait pleinement conscience. Et cela avait jeté un froid. À vrai dire, il était plus habitué aux relations froides qu'à celles s'apparentant à des amitiés, ainsi cela ne le choquait ou ne le dérangeait pas spécialement. Alcide aurait dû dire quelque chose, des banalités d'usage, mais il n'avait pas voulu. Principalement parce qu'il réfléchissait à une attitude à adopter, mais également parce qu'il ne voulait pas causer de faux espoirs à Cataleya en apparaissant comme chaleureux alors qu'il ne comptait pas l'être.

Alcide creva l'abcès d'une simple question. Son attitude pouvait paraitre froide, et il y avait une part de vrai là-dedans. C'était le professionnel en lui qui avait parlé, et non pas l'ami, l'entraîneur de la jeune femme. Alcide savait faire la part des choses, il prenait soin de ne jamais confondre vie professionnelle et vie privée, même si Cataleya avait réussi à légèrement bousculer ses convictions. Cependant, Alcide, bien qu'appréciant la demoiselle, n'oubliant pas le but du déplacement. Il en profitait pour enfin lui poser quelques questions, mais il n'allait pas se comporter en ami. Du moins, pour l'instant. Le jeune homme était lunatique, il pouvait très bien finir par se montrer chaleureux et blaguer avec la demoiselle, bien qu'il n'était pas un modèle de sociabilité. « Alcide ; tu m'as entraîné, on a fait quelques missions ensemble et tu as insisté pour que je t'accompagne sur celle-ci. C'est un peu tard pour les questions de ce type, tu ne trouves pas ? » Il devait admettre qu'elle marquait des points. De un, il l'a connaissait suffisamment, et c'était bien là les raisons de ses doutes. Avec un oeil avisé sur la demoiselle, il avait remarqué un changement de comportement. Alcide ne savait pas réellement si être proche d'elle était un bon ou un mauvais point à ce moment-là. De deux, et bien oui, il devait admettre qu'il était un peu tard pour poser ce genre de question. Ses pensées avaient été occupées par la mission de la Division, ainsi que par le futur interrogatoire qu'il ferait subir à Cataleya. Alors oui, il avait omis le fait que sa réponse ne servait à rien. Mais c'était une bonne entrée en matière, il s'en persuadait. Il acquiesça donc simplement de la tête. Le jeune homme n'était pas réputé pour être bavard. « Qu'est-ce qui te prend aujourd'hui ? » Oui, qu'est-ce qui pouvait bien le prendre ? Il était en colère comme il était excité. Et cela ne manquait pas de le perturber. La jeune femme le défia, ce qui ne manqua pas de lui faire sourire. « Je me pose des questions. » Il marqua une pause pour réfléchir à la suite de ses paroles. C'était étonnant de sa part, bien que posé et réfléchi, il ne prenait jamais soin de peser ses paroles avant de parler. En l'occurrence, là, il s'y sentait obligé. Parce qu'il allait devoir faire équipe avec Cataleya. Parce qu'elle était une amie. Et parce qu'il ne devait pas se fâcher avec elle s'il voulait des réponses à ses questions. « Des questions sur toi. J'ai l'impression que quelque chose m'échappe. » Ce n'était pas clair, il en avait conscience, mais il doutait. Il doutait soudainement de ses convictions. Et s'il s'était convaincu lui-même que Cataleya s'éloignait ? S'il avait imaginé cela ? Ce ne serait pas la première fois qu'il s'égare. « J'ai l'impression que l'on te perd, Cataleya. » lâcha-t-il, sans un mot de plus. Il lui laissait le choix d'interpréter comme elle le voulait ses paroles avant d'aller au fond de sa pensée.

Elle n’aimait vraiment pas ce qu’Alcide était en train d’insinuer. Certes, il était vrai que Cataleya prenait ses distances avec la Division et qu’elle était assaillie de nombreux doutes concernant les activités de Percy, mais son intention n’était pas de se mêler à une guerre quelconque. Certains y voyaient peut-être une preuve de lâcheté ou d’égoïsme, mais lorsque son regard se posait sur les citoyens lambda qui peuplaient la ville, elle en venait à rêvasser et à envier leur petit quotidien bercé d’ignorance. Cataleya avait toujours aspiré à une vie normale, mais elle doutait un jour de pouvoir l’obtenir tout simplement parce que cela faisait partie d’elle, c’était dans ses gênes, elle n’était pas faite pour la normalité et ne le serait probablement jamais. Adrianna lui avait dit qu’elle était une personne extraordinaire, unique en son genre et qu’elle était destinée à accomplir de grandes choses. « Je me pose des questions. ». Cataleya resta imperturbable, arquant légèrement un sourcil pour lui ordonner silencieusement de se justifier. Elle le trouvait beaucoup trop long, comme s’il pesait chacune de ses paroles et ça ne lui ressemblait pas du tout. L’agent savait que ce qu’il allait dire risquait de ne pas lui plaire. « Des questions sur toi. J’ai l’impression que quelque chose m’échappe. ». Ses sourcils se froncèrent de nouveau et la jeune femme ouvrit la bouche, prête à lui répondre avant qu’il ne lui coupe l’herbe sous les pieds. « J’ai l’impression que l’on te perd Cataleya. ». Son sang ne fit qu’un tour avant de se figer et elle se sentir déglutir avec difficulté. « Alors c’est pour ça que tu as insisté pour que je t’accompagne ? Pour me passer au crible comme si j’étais une cible ? » lâcha-t-elle à mi-voix, soufflée par cet aveu. « Est-ce que c’est ce que je suis ? Une cible de la Division ou ta cible ? » demanda-t-elle en redressant la tête, tâchant de garder sa fierté alors que cette crainte d’être ‘annulée’ lui tiraillait le ventre.

Elle lâcha un long soupir et se laissa choir sur le lit à côté de ses affaires. « Pour la leçon de morale, tu arrives un peu tard, Adrianna est passée avant toi. » expliqua-t-elle en fuyant volontairement le regard d’Alcide. « Apparemment, sauver un enfant innocent des tirs croisés ne devrait pas faire partie de nos attributions, même lorsque ça n’influe pas sur la mission. Ce gosse n’aurait été qu’un dommage collatéral. On est plus de 6 milliards sur Terre, c’est pas une grande perte ! On m’avait pourtant assurée qu’en joignant la Division je sauverais des vies et voilà que je me fais blâmer pour avoir fait mon travail tout en menant une mission à bien. ». Elle se mit à pouffer d’un rire ironique avant de le désigner d’un geste de la main. « Et je parle de ça à toi. ». Cataleya secoua la tête de gauche à droite, légèrement en colère contre elle-même avant de rétablir le contact visuel avec Alcide. « J’ai suivi Percy par instinct de préservation, parce que je n’avais nulle part où aller. La Division est ma famille et comme dans toute relation familiale, il y a certaines choses que je désapprouve, mais ça ne m’empêche pas de faire correctement mon travail et de lui être loyale alors si tu crois que je veux vous tourner le dos, je t'arrête tout de suite. » conclut-elle avant d’ajouter. « Tout ce que je viens de te dire apparaîtra sur mon dossier, j'imagine... »

Spoiler:

Peut-être se trompait-il, peut-être avait-il visé juste, mais qu’importe, il souhaitait obtenir des réponses, qu’elles répondent à ses questions ou non. Chacun défiait l’autre du regard, mais leur fierté respective les empêchait de baisser le regard. Il ne détacha pas son regard du visage de la jeune femme, examinant chacun de ses mouvements, mais, malheureusement pour lui, elle ne laissait pratiquement pas apparaitre la moindre émotion. C’était donnant-donnant, lui non plus ne bougeait pas d’un cil à mesure qu’il lui avouait ses craintes et lui posait des questions. « Alors c’est pour ça que tu as insisté pour que je t’accompagne ? Pour me passer au crible comme si j’étais une cible ? » Alcide semblait l’avoir déstabilisée, mais il ne laissait pas présager cette inquiétude qui commençait à le ronger. Plus les secondes passaient, plus ils se posaient des questions sur lui-même. Et s’il avait confondu rêve et réalité ? S’il s’était imaginé n’importe quoi ? « Est-ce que c’est ce que je suis ? Une cible de la Division ou ta cible ? » Alcide l’a regardait. Il avait beau être très attaché à elle, les comportements distants qu’elle avait eus ces dernières semaines ne le trompaient pas. Il devait arrêter de penser à Cataleya, son amie, arrêter d’être paranoïaque. Alcide était un agent confirmé, il devait faire la part des choses, même si cela le touchait personnellement. Ainsi, il prit un ton neutre avant de répondre à la jeune femme. « Ma cible. » dit-il simplement. C’était court et percutant, suffisamment pour répondre à la question de Cataleya. Voilà, il l’avait avoué. Désormais, elle était sa cible. Il devait mettre de côté le fait qu’elle était une amie.

Alcide ne la quittait pas du regard alors qu’elle partait s’installer sur l’un des lits. Quant à lui, il ne bougeait pas de sa position près de la fenêtre. « Pour la leçon de morale, tu arrives un peu tard, Adrianna est passée avant toi. » Tant mieux. Alcide n’était pas un psychologue, et les leçons de morales étaient très peu pour lui. Il était plus doué pour pousser quelqu’un au suicide plutôt que vers le bonheur. « Apparemment, sauver un enfant innocent des tirs croisés ne devrait pas faire partie de nos attributions, même lorsque ça n’influe pas sur la mission. Ce gosse n’aurait été qu’un dommage collatéral. On est plus de 6 milliards sur Terre, c’est pas une grande perte ! On m’avait pourtant assurée qu’en joignant la Division je sauverais des vies et voilà que je me fais blâmer pour avoir fait mon travail tout en menant une mission à bien. » Le jeune homme resta silencieux. Il n’était pas au courant de ça. Il n’avait jamais eu vent de ce sauvetage. Il resta silencieux quelques instants, ne sachant trop quoi dire. En réalité, il était choqué. Choqué d’avoir douté d’elle alors qu’elle avait fait ce geste rempli de bonnes intentions. Malgré tout, ça l’humanisait. Il ne doutait pas des capacités de Cataleya, mais cela était un geste trop … trop humain pour un agent de la Division. « Cela t’humanise Cataleya. Il n’y a pas de places pour des actes ainsi à la Division. » Il ne lui fit pas part de ce qu’il pensait réellement. C’était la seule chose qu’elle devait savoir. « Mais il n’y a pas que ça, pas vrai ? » C’était peut-être de la persécution, mais lorsqu’il prenait quelqu’un pour cible, il ne lâchait jamais celle-ci.

Alors que la jeune femme laissa échapper un rire, Alcide restait imperturbable. Du moins, jusqu’à ce qu’elle reprenne la parole. « Et je parle de ça à toi. » Pour la première fois, il eut une réaction. Il haussa un sourcil face aux paroles de sa petite protégée. Qu’entendait-elle par-là ? Qu’il était une machine ? Qu’il était incapable de comprendre les actes des autres ? Ce n’était pas la vérité. Malgré ses quatorze ans d’expérience et son manque d’empathie, Alcide pouvait comprendre les actes des autres. « Qu’entends-tu par-là ? » Bien qu’il connaissait la réponse, il voulait l’entendre de la bouche de Cataleya. « Tout ce que je viens de te dire apparaîtra sur mon dossier, j'imagine... » Alcide eut un léger sourire. Elle s’était laissée aller à se confesser à lui, et non pas à une secrétaire. Il n’allait donc pas se souvenir scrupuleusement de chaque mot qu’elle avait prononcé pour les rapporter plus loin. « Détrompe-toi, cela restera entre nous. Je ne veux pas te causer du tort. » Et c’était vrai. Bien qu’il la harcelait presque, il ne comptait pas la balancer à Percy. « Je m’inquiète pour toi, voilà tout. » Car, malgré tout, il avait peur pour elle. Et c’était bien la première fois qu’il l’avouait.

Spoiler:

Cataleya se souvenait encore de l’innocence des premiers jours, lorsqu’elle avait franchi le seuil de la Division aux côtés de Percy par désespoir de cause. Elle se souvenait de tout. Du silence pesant qui régnait dans l’ascenseur, la sensation qui l’avait envahi lorsque les portes avaient coulissé sur la salle d’entraînement et l’expression des têtes qui s’étaient tournées dans leur direction pour analyser la nouvelle arrivante avec scepticisme. C’était bien la première fois qu’une recrue faisait son entrée par la ‘grande porte’ – qui se trouvait être la seule issue vers le monde extérieur - en compagnie du big boss. Ils en avaient tous déduits que cette petite asiatique menue à l’apparence fragile était ‘spéciale’ et les jours qui suivirent furent un véritable calvaire pour Cataleya qui subissait sans arrêt les brimades d’assassins en devenir. Tous voulaient découvrir son secret et ils en avaient rapidement conclus que cette jeune femme n’avait rien d’exceptionnelle et qu’elle ne possédait pas une seule once de violence. Les circonstances de son ‘recrutement’ ne tardèrent pas non plus à être dévoilés au grand jour ; contrairement à eux, Cataleya n’avait pas tué personne et elle avait docilement suivi Percy. C’est sans doute pour cela que certaines recrues l’enviaient : parce qu’elle avait eu le choix qu’on ne leur a pas donné. Alcide fut l’un des seuls avec qui le feeling passait plutôt bien. Certes, il était froid et brutal, mais elle se sentait comme ‘protégée’ à ses côtés. Comme le dit si bien le proverbe : ‘les contraires s’attirent’ et c’est justement le phénomène qui s’est produit entre eux. Alcide et Cataleya étaient deux personnes diamétralement opposées ; il était grand et bien bâti, elle était petite et tellement fine qu’on ne la prenait jamais au sérieux. D’une certaine manière, ils se sont complétés. Alcide a aidé Cataleya à se perfectionner tandis que – sans vraiment le savoir – la jeune femme lui avait réappris ce que c’était que de s’attacher à quelqu’un au point de vouloir le protéger. Ce qu’Alcide insinuait la blessait profondément. Plus que les insinuations d’Adrianna, la personne chargée de leur suivi psychologique ou – en d’autres termes – de les manipuler comme de vulgaires pantins. Son acte était peut-être indépendant de la Division, mais il n’en était pas moins douloureux parce que Cataleya avait toujours aimé à croire qu’il était différent des autres, qu’il était son ami et voilà qu’à présent il doutait d’elle.


« Cela t’humanise Cataleya. Il n’y a pas de places pour des actes ainsi à la Division. Mais il n’y a pas que ça, pas vrai ? ». Cataleya n’aimait guère ce qui sortait de la bouche d’Alcide et lui faisait prendre conscience qu’il n’était peut-être pas aussi différent des autres. Peut-être l’avait-elle un peu trop idéalisé dans l’espoir de se rassurer ? Sa mâchoire se crispa violemment et elle baissa la tête en trouvant un intérêt soudain pour le bout de ses chaussures. Elle était beaucoup trop déçue, énervée, frustrée pour pouvoir contrer ses arguments ou répondre à stupide question. Bien sûr qu’il n’y avait pas que ça ! A cause de la Division, elle ne pourrait jamais faire le Bien autour d’elle, ne réussirait jamais à dormir sereinement sans voir le visage de ses victimes et, surtout, n’aurait jamais d’enfants, mais hors de question d’avouer qu’elle avait agi par instinct maternel, le pire des blasphèmes pour un assassin. « Qu’entends-tu par-là ? » « Que tu n’as pas vraiment la tête d’un psychologue. » rétorqua-t-elle sans hésiter une seule seconde. Il lui fallut un bon moment pour accuser le coup de cette ‘attaque de front’. Cataleya peinait à s’en remettre. Il venait de chambouler ses principes en lui rappelant que la Division ne laissait pas de place à la sensiblerie. Non, vraiment, elle n’avait plus du tout envie de faire cette mission avec lui. Elle ne voulait même plus se retrouver dans la même pièce que lui ! La jeune femme déglutit avec difficulté la boule qui s’était formée au niveau de sa gorge, sentant la migraine poindre le bout de son nez. Cataleya n’était pas stupide, elle savait pertinemment qu’en continuant sur cette voix, Percy n’aurait plus aucune raison de la garder en vie et peut-être demanderait-il à Alcide de la supprimer. « Détrompe-toi, cela restera entre nous. Je ne veux pas te causer du tort. Je m’inquiète pour toi, voilà tout. ». Cette phrase qui sonnait comme un aveu, Cataleya eut l’impression de se la prendre au coin de la figure avec la violence d’une gifle. C’était bien la première fois qu’il entendait ce genre de propos de la bouche d’un membre de la Division, de la bouche d’Alcide pour qui elle avait toujours eu l’impression d’être une enfant, un jouet presque… En fait, c’était la première fois – depuis que sa famille était morte – qu’elle entendait quelque chose comme ça. Elle en était presque soulagée, comme si elle existait enfin pour autre chose que la Division, mais cette sensation s’évapora aussi vite lorsqu’elle se souvint qu’IL était l’atout majeur de Percy. C’était clair à présent : il la manipulait en lui faisant croire des choses, Alcide avait été doué pour ça en jouant le rôle de Shane auprès de Genesis. « Fais attention, ça t'humanise. » répondit-elle avec amertume. Il avait réveillé sa méfiance et son côté sauvage. Lui répondre ainsi alors qu'il montrait enfin une once de compassion n'était peut-être pas la solution, mais Caty n'avait pas pu s'en empêcher. « Je vais me doucher. » conclut-elle précipitamment dans un soupir rageur avant d’attraper ses affaires sur le lit et de se diriger jusque la salle de bain, souhaitant mettre le plus de distance possible entre elle et cette atmosphère pesante.

Spoiler:

Tout comme Cataleya, Alcide s’était laissée aller à s’imaginer vivre une vie normale. Cependant, ces quelques moments d’égarements s’étaient vite dissipés dès l’instant où il prenait conscience qu’une vie normale n’était pas faite pour lui. Principalement parce que lui-même n’était pas quelqu’un de normal. Il avait conscience que ses actes passés l'empêchait de s'imaginer plus de quelques secondes dans la peau d'un homme dit normal, comme... comme Shane. En réalité, il avait expérimenté un mode de vie plus tranquille aux côtés de Genesis, mais il ne l'avait jamais réalisé. Cela n'était pas pour lui. Dès qu'il s'imaginait avec une belle maison, un chien, une femme et éventuellement des enfants, il avait un haut le coeur. S'il mettait de côté le fait qu'elle faisait partie de la Division, Cataleya était plus apte à se fondre de la masse que lui. En dehors de ces agissements en rapport à la Division, elle avait le profil type de la jeune femme qu'on croise dans la rue. S'il avait vu plus loin que le bout de son nez, c'est-à-dire plus loin que la Division, Alcide aurait compris les désirs de la jeune femme, de s'échapper de cette organisation oppressante. Mais le jeune homme était égoïste, ce n'était plus à démontrer, et il ne comprenait pas que l'on souhaite mener une vie de banlieue et être lâche envers la Division, alors que Percy a sauvé de nombreux jeunes, dont Cataleya, dont lui. Il avait une profonde haine pour les lâches. Pour lui, le métier d'Agent surpassait le reste. L'adrénaline était la chose la plus importante dans sa vie. Au fond, et même si ne se l'avouera jamais, il avait également peur de la perdre. Alcide était réaliste, il avait conscience que les chances pour Cataleya de quitter la Division en vie étaient proches du néant. Jamais Percy ne la laisserait partir. Et l'idée de l'imaginer morte lui faisait de la peine. Oui, de la peine, ce qui était une grande première pour lui. Morte ou enfuie, elle lui manquerait. La jeune femme était sa première vraie recrue, celle qui avait été sa meilleure élève, la plus douée, la plus forte et la plus agréable. C'était donc un moment désagréable pour lui de réaliser qu'elle pouvait lui échapper.

Le fait d'être proche d'elle était plutôt difficile dans la mesure qu'il ne savait pas quelle attitude adopter. Sa raison était divisée, et il faisait preuve d'un caractère lunatique comme jamais auparavant. Il avait conscience qu'il devait être un agent avant un ami, mais même pour lui, c'était difficile à ce moment-là. Heureusement pour lui, le ton froid et exaspéré de la jeune femme l'aidait grandement. « Que tu n'as pas vraiment la tête d'un psychologue. » Il avait voulu sa réponse, il l'avait eue. Alcide avait bien compris où voulait en venir la jeune femme, mais l'entendre de sa bouche était important pour lui. « Je prends cela pour un compliment. » S'il n'avait pas la gueule du confident, il en était ravi. Être l'oreille compatissante, très peu pour lui. « Fais attention, ça t'humanise. » Le jeune homme eut un léger sourire. La demoiselle était bien évidemment sarcastique. Bien qu'au fond, il avait fait preuve de faiblesse en lui avouant qu'il s'inquiétait pour elle, c'était bien la seule et unique fois qu'il allait déclarer ouvertement qu'il était attaché à elle. Son attitude actuelle laissait peut-être présager le contraire, mais Cataleya restait sa protégée, son amie, l'objet de son affection. Quoi qu'elle est en pense, quoi qu'elle est en dise. « Tu préfères que je souhaite ta mort ? » répondit-il sèchement malgré tout. Parce qu'au fond, il était vexé qu'elle réagisse ainsi, alors qu'il avait franchi une barrière jamais franchie jusqu'ici. Elle était la première personne à laquelle il ouvrait presque son coeur - à sa manière - et c'était ainsi qu'elle le remerciait. Alors oui, au fond, il était vexé. C'était une première. « Je vais me doucher. » dit-elle alors. Alcide laissa échapper un soupir suffisamment bruyant pour faire part de son agacement à Cataleya, répondant au tac-au tac : « Tu fuis. » À cet instant précis, il la trouvait particulièrement lâche de disparaitre ainsi, de fuir ainsi face à une conversation qui commençait à la dépasser. Il en oublia presque les quelques paroles qu'il avait laissées échapper auparavant. Il était attaché à elle, bien plus qu'il ne l'aurait jamais pensé, mais son comportement le décevait. Ainsi, il aurait voulu revenir en arrière et effacer ces paroles faibles qu'il avait prononcées, tout simplement parce qu'au final, elle ne les méritait pas. Il resta silencieux quelques instants. Il eut envie de lui attraper le bras, de la retenir et de l'obliger à faire face à lui. Mais au fond, malgré son envie de découvrir ce que sa jeune amie pouvait bien cacher, il ne voulait pas qu'elle le déteste. Alcide réalisa avec horreur et stupeur qu'elle avait malheureusement raison. Oui, cela l'humanisait. Elle l'humanisait. Et il allait encore se le prouver en décidant de ne pas revenir sur le sujet. « Je garde un œil sur toi. » se contenta-t-il de dire, comme un avertissement. Jamais il ne lui ferait de mal. Mais malgré tout, son rôle d'agent passait avant son attachement. « Quand tu auras fini, nous discuterons de la mission. » Même s'il reviendrait à l'attaque tôt ou tard, Alcide savait que leur mission passait en premier sur son petit interrogatoire. L'avenir de la Division en dépendait, et loyal comme il était, il se résout à s'y concentrer.

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« Je prends cela pour un compliment. »[/b]. Par cette simple tirade, Alcide venait de perdre le peu de confiance que Cataleya avait pour celui qui fut son premier allié au sein de la Division. Elle savait qu’il n’était pas bon de se confier à une autre personne de son unité parce que toutes ces choses confiées pouvaient un jour se retourner contre elle, mais Cataleya était comme ça. Certes, elle savait parfois taire ses problèmes, mais de temps en temps, elle aimait bien se ‘confier’ à une autre personne et savait à présent que Alcide ne faisait plus partie de la liste des quelques rares personnes en qui elle croyait. « Prends-le comme tu veux, ça m’est égal. » cracha-t-elle, mauvaise. En réalité, Cataleya était profondément blessée. Elle qui avait toujours considéré Alcide comme un pilier de sa nouvelle vie venait tout juste de l’ébrécher. « Tu préfère que je souhaite ta mort ? ». Cette fois-ci, la jeune femme serra les dents faisant ainsi battre les muscles de sa mâchoire et secoua la tête de gauche à droite. C’était presque comme s’il était touché par on innocence ou frappé par sa stupidité. Le ton de sa voix l’avait fait frissonner désagréablement, voilà que l’atmosphère de cette chambre d’hôtel était soudainement devenue très pesante. Si pesante que la jeune femme ne trouva pour seul moyen que de se réfugier dans la salle de bain. « Tu fuis » lâcha-t-l dans un soupir profondément agacé. « Si tu le dis, Alcide… » marmonna-t-elle entre ses dents. Elle n’était pas à court d’arguments, elle était juste fatiguée des petites insinuations de son mentor. « Je garde un œil sur toi. » « Essayes toujours. » rétorqua-t-elle froidement en le défiant du regard. Cataleya n’avait décidément pas froid aux yeux. « Quand tu auras fini, nous discuterons de la mission. ». Non mais il se foutait d’elle là ? Il venait de lui dire ne plus avoir confiance en son jugement, mais il tenait quand même à ce qu’elle exécute la mission sans opposer de résistance ? « Ah ouais, parce que tu comptes me surveiller et mener la mission en même temps ? Tu sais quoi, Alcide ? Va te faire foutre avec ta foutue mission ! T’aurais jamais dû insister pour me faire venir ici et je n’ai pas peur de toi parce que je sais comment tu fonctionnes et tu es trop prévisible. » lança-t-elle avec dédain.


Il avait réussi à la mettre en colère tant et si bien qu’elle claqua la porte un peu plus fort que prévu et s’y enferma. Cataleya resta un moment adossé à la porte, déglutissant avec difficulté comme si elle se rendait compte qu’elle se trouvait dans la même pièce qu’un assassin, ce qu’elle était aussi. Il lui fallu un moment pour reprendre ses esprits avant de s’élancer vers la douche plus déterminée que jamais à ne plus trop s’attacher aux membres de la Division. Elle se déshabilla, s’engouffra dans la cabine de douche et y resta jusqu’à ce que la vapeur d’eau ne recouvre totalement la pièce. Lorsqu’elle en sortit, l’asiatique se sécha et s’habilla, puis ouvrit la fenêtre pour évacuer l’humidité de la salle de bain, mais lorsqu’elle vit le monde qui s’offrait à elle quelques étages plus haut, Cataleya se hissa à l’extérieur et grimpa jusqu’au toit où elle se percha. Elle avait toujours adoré être en hauteur, se sentir plus grande dans un monde où elle était censée être morte… c’était comme si le monde lui apparaissait soudain en couleurs. Elle savait que ce répit serait de courte durée, que Shane finirait bien par la rejoindre ici lorsqu'il se rendrait compte qu'elle avait disparu et que peut-être il la tuerait comme du bétail pour avoir réagi contre les ordres, mais ça lui était parfaitement égal. Elle plia les genoux, enroulant ses bras autour de ceux-ci et se contenta d'observer le trafic londonien attendant presque la Faucheuse dans un calme olympien. Si elle mourrait ce soir, alors ce serait en ayant l'impression d'être libre. Quelle belle mort...